Les architectes utilisent de plus en plus le bois massif dans l’espoir de construire des bâtiments dits « nets zéro », c’est-à-dire à impact carbone nul. Les méthodes d’évaluation de l’empreinte carbone dans le bâtiment, celle notamment de l’ACV, ou analyse du cycle de vie, tendent à indiquer des émissions significativement plus faibles pour les constructions bois par rapport à celles entièrement en béton et en acier. Pourtant, à y regarder de plus près, ces évaluations pourraient être l’arbre qui cache la forêt…
Car la méthode standard pour déterminer l’empreinte carbone globale d’un bâtiment, la fameuse analyse du cycle de vie du bâtiment, qui décompose les émissions à chaque étape, de l’approvisionnement en matières premières à leur élimination finale, ne tiennent généralement pas compte de tout ce qui se passe dans la forêt. Or, la gestion des forêts est, du point de vue du climat et de la biodiversité, extrêmement importante.
Par ailleurs, étant donné que peu de bâtiments en bois massif ont été construits jusqu’à présent – et encore moins démolis – les chercheurs sont incapables de prévoir, de manière fiable, ce qu’il adviendra du bois à la déconstruction et quelles émissions cela entraînera.
A date, les recherches indiquent que la substitution du bois à l’acier et au béton dans les immeubles de moyenne hauteur pourrait réduire les émissions carbone provenant de la fabrication, du transport et de la construction de 13 à 26,5 %, selon la conception du bâtiment, les types de bois utilisés et d’où ils sont expédiés.
Mais en raison d’un manque de données, l’Institut International du Développement Durable (IISD) a averti que les ACV peuvent passer sous silence les énormes impacts que la gestion forestière et la fin de vie peuvent avoir sur l’impact climatique global d’une construction bois.
Aujourd’hui, à l’heure où la construction bois prend son envol, les chercheurs, comme les architectes, ne disposent donc que d’une image incomplète des impacts climatiques totaux de cette filière de construction. Un problème qui devrait être traité de toute urgence si l’industrie veut se développer de manière durable sans effets néfastes sur l’environnement.
Lionel Cottin
Directeur de la rédaction