Plus une semaine ne passe sans au moins un gros titre sur l’expression à la mode : le travail hybride ! En France, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, le sujet de prédilection de toute la sphère immobilier, environnement de travail, RH et même de bon nombre de dirigeants, c’est ce fameux travail hybride.
On ne saurait le condamner. D’abord parce que cela permet aux professionnels en charge de ces sujets d’être mis en lumière sur d’autres items que la réduction des coûts, les RPS et les défauts de maintenance, de sécurité ou de propreté et, rappelez-vous, ce n’était pas si fréquent… Mais également parce que les défis que posent cette nouvelle organisation du travail (tertiaire majoritairement) sont variés et de taille pour des organisations qui n’avaient pas toutes anticipé une telle évolution – pour utiliser un euphémisme – pourtant sous-jacente depuis plusieurs années déjà.
Plus que le travail hybride, c’est le retour au bureau qui devrait être dans toutes les têtes. Car pour qu’il y ait travail hybride, encore faut-il que les salariés reviennent sur leur lieu de travail ! Or, vous êtes nombreux à me faire remonter des taux de présence bien inférieurs à la période pré-épidémique, quand ils ne sont pas carrément inquiétants, et je pense évidemment au vendredi…
Plus que jamais, nous nous trouvons face à des espaces de travail vides la plus grande partie du temps. En plus du soir et du week-end, les voilà quasi vides le vendredi et occupés à 40% – maximum ! – des capacités en journée, en semaine. Ça commence à faire cher le mètre carré loué, chauffé, éclairé, nettoyé et équipé pour… personne ! Sans compter l’hérésie environnementale…
C’est peut-être une des raisons qui poussent de plus en plus de pays et d’entreprises à envisager la semaine de quatre jours. La dernière étude en date sur le sujet aux Etats-Unis est surprenante : 62% des entreprises interrogées disent être déjà passées ou envisager de passer à la semaine de quatre jours ! Pour beaucoup de dirigeants interrogés, c’est une réponse au développement du télétravail et au besoin de flexibilité accru exprimé par les salariés, des salariés qu’ils ont par ailleurs de plus en plus de mal à recruter et à fidéliser.
Un autre grand défi du retour au bureau se trouve dans la nécessité de transformation des entreprises elles-mêmes. Salima Benhamou, économiste au département « Travail, Emploi, Compétences » de France Stratégie, avait rédigé un rapport sur le travail en 2030 il y a seulement cinq ans. A l’aune des crises que le monde a connu depuis, elle estime, plus que jamais, que les entreprises doivent vite évoluer vers des modèles d’entreprise apprenantes, orientées vers le travailleur et s’appuyant sur une approche du travail volontariste, d’où découlent des pratiques organisationnelles et managériales participatives : décentralisation des décisions et autonomie, travail en équipe… Dans ce modèle, les managers doivent revoir leurs pratiques, mais pour cela, les dirigeants et les DRH doivent les former et les sélectionner différemment. Impossible, par exemple, de devenir chef d’équipe uniquement grâce à ses diplômes ou suite à une promotion. Selon Salima Benhamou, les dirigeants devront aussi comprendre, plus généralement, combien le choix qu’ils feront en matière d’organisation du travail aura un impact sur la performance de chacun. On ne saurait mieux dire…
Le retour au bureau est aussi l’occasion de mettre en visibilité des contradictions et des défaillances dans le fonctionnement de nos entreprises. J’en veux pour preuve les résultats édifiants de l’étude menée par le consortium de recherche Future Forum Pulse fin 2021 sur le sujet des attentes des managers et des collaborateurs sur ce sujet du retour au bureau.
Mené dans sept pays différents, l’étude montre l’écart existant entre la vision des managers et celle de leurs collaborateurs, les premiers prévoyant un retour au bureau majoritairement en présentiel, les seconds plébiscitant le télétravail. Des managers considérant à 72% qu’ils ont été très transparents s’agissant de la politique de télétravail mise en place après le retour au bureau, tandis que 47% de leurs collaborateurs seulement partageaient ce constat…
L’étude du Future Forum Pulse met enfin en perspective un sujet qu’on ne pensait pas forcément lié au retour au bureau : celui de l’inclusion. En effet, les résultats montrent que les femmes ou les minorités souhaitent plus ardemment recourir au télétravail que les hommes et les salariés appartenant à des groupes majoritaires. Le sujet est toujours très sensible mais les raisons citées dans l’étude pour expliquer cet écart en faveur du télétravail (fuir les comportements jugés agressifs, voire le harcèlement) donnent tout de même matière à réflexion. Des réflexions que les entreprises sont de fait de plus en plus nombreuses à mener, le sujet de l’inclusion revenant de plus en plus dans les échanges que je peux avoir avec vous, chers directeurs de l’immobilier et de l’environnement de travail.
Un défi de plus à relever. Que dis-je, des défis de plus à relever !
Vous pouvez compter sur toute l’équipe d’ANews WorkWell pour vous y aider !
Très belle semaine à toutes et à tous.
Lionel Cottin
Directeur de la rédaction